Observatoire des activités postales : année 2004 (publié le 11 avril 2006)
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Préambule
En 2005, l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes a entrepris de créer un observatoire de l’activité postale, sur le modèle de son observatoire des marchés des communications électroniques. A cette fin, une enquête a été mise en place pour collecter des données relatives au marché postal, comme le prévoit la loi du 20 mai 2005 relative à la régulation des activités postales (l'article L.135 du code des Postes et Communications Electroniques).
Elle vise à restituer aux acteurs du secteur et au public les principaux indicateurs du secteur (revenus, volumes de trafic et nombre de points d’accès). Pour donner une vision suffisamment complète des marchés en cause, elle ne se limite pas aux activités soumises à autorisation (la distribution d’envois de correspondance, y compris transfrontalière), mais porte aussi sur les activités du routage, de l'express et du colis(1). C'est pourquoi des entreprises a priori en dehors du champ d’application du dispositif d’autorisations, ou les fédérations les représentant, ont aussi été sollicitées.
La présente publication restitue les résultats d’une première collecte d'informations portant sur l'activité des sociétés au cours de l'année 2004 sur le territoire français. Elle constitue une première approche des marchés postaux.
I. Panorama des marchés
Le graphique ci-dessous présente les volumes d’objets postaux traités, ainsi que les CA correspondants et donne des exemples d’entreprises actives sur les différents marchés étudiés.
Schéma n° 1
Ce schéma fait d’abord apparaître les volumes d’objets majoritairement distribués ou traités par les différents opérateurs sollicités ; les envois non adressés(2) (18,6 milliards) sont à eux seuls pratiquement aussi nombreux que les envois adressés, répartis ici entre les lettres, la presse, les colis, les recommandés et envois express.
La part encore élevée des envois du secteur réservé dans le total des envois de correspondance est de 15 milliards sur 16,2 avec un monopole sur les envois de correspondance d’un poids inférieur à 100g(3).
Ce schéma révèle également différentes modalités de distribution : la distribution point à point, à délais garantis et preuve de livraison de l’express, la distribution " classique " en boîtes aux lettres. Cette dernière peut se faire sur liste d’abonnés pour le portage de presse.
Schéma n° 2
La dispersion des prix moyens de chaque produit reflète notamment la dispersion des coûts des techniques de distribution utilisées. La moins coûteuse est la distribution en mode non-adressé (0,03€ pour le pli non adressé) et les plus coûteuses sont les distributions du colis, du recommandé (environ 4€ par objet) et celle des envois express (environ 8€ par objet). Les frontières entre les marchés du recommandé et de l’express(4) et entre les marchés de l’express et du colis(5) ne sont pas totalement claires et pourraient vraisemblablement évoluer.
Schéma n° 3
1) La distribution des envois de correspondance
Les envois de correspondance représentent environ 16,7 milliards d’objets, dont l’export. La plus grande partie relève du monopole postal, soit environ 90% du total des envois de correspondance (hors envois recommandés).
En novembre 1998, le cabinet CTCon a réalisé pour la Commission Européenne(6) une " Etude sur l'impact des limites de poids et de prix du domaine réservé dans le secteur postal ". Les flux de courrier ont été analysés de manière agrégée pour les 11 pays européens étudiés. Le graphique ci-dessous illustre la répartition des flux de courrier en volume en 1998 :
Schéma n° 4
Selon cette étude, le marché ouvert à la concurrence représentait en 1998 dans les 11 pays considérés 8% des flux de correspondance, c'est à dire plus précisément 7% des flux de lettres et 11% des flux de publipostage. L'abaissement des limites du secteur réservé de 100g à 50g aurait eu pour conséquence, mis en oeuvre en 1998, de doubler le volume de marché ouvert à la concurrence (de 8% à 16% pour l'ensemble des envois de correspondance).
Dans ce domaine, ADREXO se positionne comme le principal concurrent de La Poste. Cette filiale du groupe Spir Communications s’appuie sur sa principale activité de distribution des imprimés sans adresse pour développer une offre de services de distribution adressée.
Le cas particulier des envois internationaux
Le segment du courrier international sortant est ouvert à la concurrence pour toutes tranches de poids. Les opérateurs alternatifs sont pour la plupart des filiales des postes européennes (Deutsche Post Global Mail, Swiss Post, Spring) - à l’exception d’IMX - et n’ont que des bureaux de vente en France.
2. La distribution de la presse
La diffusion de la presse est réalisée par trois canaux :
- Les messageries urbaines de presse (NMPP et MLP (7)) alimentent les points de vente au détail (kiosques à journaux),
- Le portage : les éditeurs de presse distribuent eux-mêmes ou font distribuer leurs quotidiens,
- La distribution par La Poste.
Schéma n° 5
Seuls les porteurs de presse (250 environ) et La Poste font partie du périmètre de l’observatoire. Le portage représente en effet une alternative à la distribution postale. Il s'agit de réseaux créés par les éditeurs de presse pour la distribution de leurs quotidiens, sans passer par La Poste.
Hors distribution des NMPP et des MLP, la distribution de la presse à domicile (portage et distribution postale) représente environ 3 milliards d’objets répartis à raison de deux tiers pour le circuit postal et un tiers pour le portage, pour un chiffre d’affaires total d’environ 1,8(8) milliard d’euros en 2004.
3) Le marché du colis domestique
Le marché du colis (de 0 à 30 kg) se caractérise par des délais plus importants que ceux des envois express. Il est complètement ouvert à la concurrence mais partiellement régulé : le service universel garantit qu’une offre de colis jusqu’à 20 kg est disponible sur tout le territoire. L’observatoire de l’ARCEP ne couvre pas les services de messagerie lourde.
Coliposte, la division de La Poste en charge du colis est positionné sur tous les segments du marché du colis domestique (B-to-B, B-to-C, C-to-B et C-to-C), mais se trouve plus particulièrement en concurrence sur :
- le segment B-to-B notamment avec Exapaq ;
- le segment B-to-C : en effet, les groupes de vente par correspondance (Les 3 Suisses, La Redoute et Yves Rocher) ont mis en place leurs propres réseaux de distribution à domicile : Mondial Relay, SOGEP et Distrihome. De plus, la traditionnelle livraison à domicile n’étant pas toujours une réponse appropriée aux besoins des consommateurs, qui sont de plus en plus demandeurs d’une livraison en phase avec leurs modes de vie, en particuliers les actifs, les vadistes offrent aussi la livraison en points relais avec Alvéol, Kiala et la Sogep.
En 2004, le marché observé concerne au total 345 millions d'objets, pour un chiffre d'affaires de 1,4 milliard d'euros.
4) Le marché de l'express domestique
Le transport express correspond à la livraison d’objets et de plis dans des délais garantis et à une distribution point à point, du seuil de la porte de l’expéditeur jusqu’à celui du destinataire. Pour le trafic international, les services offerts par les intégrateurs s’appuient en particulier sur des moyens aériens. Les expressistes font bénéficier leurs clients d'un suivi informatisé et d'une preuve de livraison de leurs objets. Tous ces services peuvent expliquer, que pour un pli domestique de moins de 100g en express, la facture du client puisse atteindre plus de 30€ contre 1,22€ pour ce même pli en courrier prioritaire.
Le marché français de l’express est marqué par une hyper segmentation des offres avec différents délais de livraison mais également une verticalisation des offres par secteurs d’activité. Les transporteurs introduisent de nouveaux services afin de se différencier sur un marché particulièrement concurrentiel.
Le marché de l’express domestique est divisé entre les offres de plis et de " colis légers " pesant moins de 30kg (qui constituent le coeur du marché de l’express) et les offres " tous poids ". Les principaux transporteurs express, Chronopost International, Exapaq, GLS (General Logistics Systems) et TNT Express se positionnent sur le segment du " colis léger ".
Selon une estimation de l’UFEX, le marché observé (le segment du colis " léger ") concerne environ 260 millions d’objets, pour un chiffre d’affaires d’environ 2 milliards d’euros en 2004.
5) La distribution de la publicité non adressée
Le marché de la distribution des plis non adressés (messages sans référence personnelle, sans adresse et sans nom) est totalement concurrentiel. Selon la loi relative à la régulation des activités postales, la publicité non adressée n’est pas un envoi postal.
Contrairement à l’économie du " courrier adressé ", ces plis ne nécessitent ni collecte, ni tri, ni tournées quotidiennes de distribution. L’économie de la publicité non adressée peut utiliser le géomarketing reposant sur une segmentation précise des prospects avec un ciblage fin de la zone démarchée.
Ce marché est particulièrement développé en France du fait de l’importance du secteur de la grande distribution et des grandes surfaces spécialisées qui utilisent ce média. Mais les acteurs du secteur s’attendent à des évolutions du fait de la modification du décret qui interdisait la publicité télévisée pour plusieurs secteurs dont la grande distribution.
Ce marché est désormais dominé par deux grands opérateurs nationaux : en 2004, plus de 18,6 milliards de plis non adressés sont distribués en France par Mediapost (filiale du Groupe La Poste), par Adrexo et par une myriade de petits opérateurs locaux ; le chiffre d’affaires total est estimé à 600 millions d’euros.
II. Les activités en amont de la distribution
Le routage est défini par la Commission européenne comme " une activité de préparation de courrier en amont de la prise en charge de celui-ci par La Poste dans le cadre de ses prestations du domaine réservé " (décision n°2002/344/CE du 23 octobre 2001).
Historiquement, le routeur exerce plusieurs types d’opérations de pré-postage, situées en amont des activités de La Poste : conditionnement (assemblage, façonnage, adressage, mise sous enveloppe ou sous film et " colisage ") des objets postaux, tri (groupement en liasses et sacs postaux par destination), affranchissement.
Les grands émetteurs de courrier (banques, assurances, grands comptes) confient leurs envois (relevés de banque, quittances, factures, etc.) aux routeurs spécialisés qui les préparent selon différents niveaux de sophistication en fonction de la nature et du volume de courrier expédié.
Aujourd’hui, les activités des routeurs(10) sont plus diversifiées, certains offrent une palette de services, notamment grâce à l’informatisation :
- commercialisation de fichiers et traitements de données informatiques ;
- préparation et expédition des commandes.
Huit grands domaines de diversification peuvent être distingués : le marketing direct, la logistique de VPC (fullfilment), les travaux d’impression, le stockage et le transport, l’archivage et la gestion électronique de documents (pour le courrier de gestion), l’informatique, la gestion de la relation client (pour le marketing direct). Les routeurs peuvent ainsi se situer aussi bien en amont qu’en aval des activités traditionnelles de La Poste.
L’activité de routage donne lieu à l’établissement de relations entre, d’une part, l’émetteur-annonceur et le routeur et, d’autre part, entre le routeur et La Poste.
Les activités de routage introduisent donc une concurrence dans le secteur postal sur les marchés amont du secteur postal (collecte, tri, transport d’une part, prestations de routage et de consolidation, d’autre part).
Schéma n° 6
En 2004, le courrier industriel (envois en nombre expédiés par les grands émetteurs) représente environ 50% du total des envois de correspondance expédiés. Il s’agit d’envois en nombre de publicité adressée et de courrier de gestion (factures, relevés bancaires). La part du courrier industriel dépend de l’offre commerciale de La Poste pour ce type d’envois.
Le reste correspond aux envois égrenés des particuliers, des petits professionnels, mais aussi des grands émetteurs qui envoient du courrier égrené.
Selon les chiffres du SNELPD, le routage est assuré, en France, par environ 200 entreprises spécialisées. Il existe des routeurs spécialisés dans le marketing direct, dans le courrier de gestion et d’autres spécialisés dans la presse.
1) Le routage du marketing direct et du courrier de gestion
56% du courrier industriel est traité par les routeurs, soit 5,1 milliards d’objets (marketing direct et courrier de gestion). Le reste est traité directement par les grands émetteurs avant d’être déposé à La Poste.
Selon le SNELPD, en 2004, 80% du trafic total de publicité adressée (ou marketing direct) est traité par les routeurs ; 15% de ce trafic provient de petits flux de courrier consolidés par des regroupeurs.
Les routeurs spécialisés dans l’éditique de courrier de gestion (factures, relevés de banque, quittances, etc.) sont des laséristes.
Cette activité se différencie du routage de marketing direct par des machines plus sophistiquées, une main d’oeuvre plus qualifiée mais surtout un traitement différent du courrier (impératifs de sécurité, de confidentialité et d’intégrité du pli).
Ce segment est essentiellement dominé par des grands groupes qui ont plusieurs sites de production répartis sur le territoire.
Selon le SNELPD, en 2004, 35% du trafic total de courrier de gestion est traité par les routeurs.
2) Le routage de presse
Le routage de presse aux abonnés est assuré par des sociétés spécialisées travaillant en étroite et constante collaboration avec les éditeurs et La Poste et qui prennent en charge le conditionnement, l’affranchissement, le tri et l’expédition des envois de quotidiens et de périodiques.
Selon le SNELPD, en 2004, 76% du trafic presse aux abonnés distribué par La Poste est traité par les routeurs, soit 1,4 milliard d’exemplaires.
Sur la presse aux abonnés distribuée par La Poste, les routeurs traitent les deux tiers des envois de presse urgente et la totalité des envois de presse non urgente.
III. Décomposition des trafics et des chiffres d'affaires pour l'ensemble des activités postales représentées
Sur la base des schémas 1 et 6, l’ensemble des résultats peut être reconstitué de la manière suivante :
Valeurs 2004 | ||
Activité | Volumes (milliards) | CA (milliards €) |
Correspondance et catalogues* | 16,71 | 7,60 |
- Courrier égrené
- Courrier industriel non routé
- Courrier industriel routé | 7,71 3,90 5,10 | n.d. n.d. n.d. |
Recommandés | 0,23 | 1,00 |
Presse aux abonnés | 2,95 | 1,80 |
Circuit postal - Routé - Non routé Par portage | 2,00 1,40 0,60 0,95 | 0,80 n.d. n.d. 1,00 |
Colis domestique | 0,35 | 1,44 |
Express domestique | 0,26 | 2,00 |
Publicité non adressée | 18,60 | 0,60 |
* Cette catégorie de produit se ventile également de la façon suivante :
- Secteur réservé 15,00 6,60
- Secteur libéralisé (hors export) 1,23 1,00
- Export 0,48 n.d.
Total 16,71 7,60 (hors export)
IV. Les points d'accès au réseau postal
Les points d’accès sont des installations physiques, notamment les boîtes aux lettres mises à la disposition du public, soit sur la voie publique, soit dans les locaux des opérateurs, où les envois postaux peuvent être déposés par les usagers afin d’y être traités.
Le territoire métropolitain compte à la fin de 2004 :
- 13 722 bureaux de poste gérés en propre par La Poste,
- 3 225 agences postales, agences postales communales et relais poste commerçants,
- 140 500 boîtes aux lettres de dépôt (les " boîtes jaunes ").
A ces points d’accès, il convient d’ajouter :
- 33 800 bureaux de tabac et grandes surfaces vendent, pour le compte de La Poste, des timbres ou des enveloppes pré-timbrées,
- Environ 270 000 entreprises affranchissent leurs objets remis à La Poste, grâce à une machine à affranchir, en y apposant la marque d’affranchissement correspondant à la catégorie de produit et à la tranche de poids.
En 2004, 125 000 facteurs ou distributeurs déposent du courrier dans les 26 millions de boîtes aux lettres particulières.
ANNEXE
Liste des opérateurs interrogés dans le cadre de la collecte 2004
- Adrexo
- Belgian Post International
- DHL
- IMX France
- La Poste
- Spring
- Swiss Post International
Liste des organisations professionnelles interrogées dans le cadre de la collecte 2004
- Association des Prestataires de services en Editions Multi-Média (APEM) : le routage.
- Syndicat national des entreprises de logistique de publicité directe (SNELPD) : le routage.
- Union Française de l’Express (UFEX) : le marché de l’express.
- Fédération des entreprises de vente à distance (FEVAD) : le marché du colis.
_____________________________________________
(1) Cf. Annexe.
(2) Les envois non adressés ne sont pas des envois postaux, ni au sens de la loi de la régulation des activités postales, ni dans la directive postale modifiée 2002. C’est moins clair au regard de la nomenclature (NAF) de l’INSEE, la publicité non adressée pouvant soit être classée en 74.4 " Publicité " pour " la distribution de prospectus et d’échantillons publicitaires ", soit en 64.1 " Activités de poste et de courrier " pour la distribution des " envois en nombre sans adresse ".
(3) La limite de poids du monopole de La Poste a été abaissée à 50 g, le 1er janvier 2006.
(4) Ce sont toutes deux des prestations à " valeur ajoutée " impliquant une remise contre signature et faisant l’objet d’un traitement spécifique.
(5) Les critères discriminants entre ces deux segments ne sont pas non plus toujours clairs : limites de poids, délais garantis, etc.
(6) Pour les besoins de cette étude, CTCon a analysé près de 38,855 millions d’objets de correspondance et 14,107 millions de plis de publipostage adressé dans 11 pays européens : Belgique, Allemagne, Danemark, Grèce, Luxembourg, France, Autriche, Italie, Portugal, Irlande et Royaume-Uni.
(7) Nouvelles Messageries de la Presse Parisienne et Messageries Lyonnaises de Presse.
(8) D’après une estimation de 2003 de la Direction du Développement des Médias pour le CA du portage. Le trafic correspondant est une estimation du SNELPD et de l’Observatoire de la presse Grand Public (Année 2004).
(9) Décret du 27 mars 1992 modifié par le décret du 7 octobre 2003 sur la publicité télévisée et les secteurs interdits.
(10) Le SNELPD dénombre environ 200 entreprises de routage qui déposent régulièrement du courrier à La Poste et qui, à ce titre, peuvent être considérées comme actives sur ce marché.