Sébastien Soriano, président de l'Arcep, n'exclut pas de s'intéresser aux acteurs du numérique. Pour les réguler en tant qu'acteur des télécoms, il faudra attendre l'Europe. Mais pour lui, l'urgence est à la compréhension du phénomène. Et pour cela, il en appelle à une notation des plates-formes via un appel à la multitude, dont l'Arcep pourrait être le greffier.
L'Usine Digitale : Pour vous, la régulation par la data est devenue indispensable à l'agilité des régulateurs des télécoms. Est-ce à cause de l'interférence des acteurs du numérique sur ce secteur ?
Sébastien Soriano : Bien sûr. Le numérique nous force à passer à un acte 2 de la régulation, à changer d'échelle. Les changements s'accélèrent et l'écosystème devient de plus en plus complexe. Quand on accompagne le plan France très haut débit de 20 milliards d'euros d'investissement dans la fibre optique, par exemple, on a toujours une petite sueur au front. Ces efforts ne vont-ils pas être réduits à néant par les constellations de satellites basse orbite d'Elon Musk ou de Greg Wyler ?
On est vite rassurés parce que cette technologie ne fournit pas les mêmes débits et ne connecte qu'un nombre limité de foyers, mais on est néanmoins dans une incertitude de plus en plus grande liée à cette complexité croissante du numérique. D'autant que ce sont des stratégies d'acteurs mondiaux. Il y a les drones de Facebook et les projets Loon et Google Fi d'Alphabet. Sans oublier Apple qui a toujours l'ambition latente de prendre le contrôle des téléphones au niveau de la carte SIM, qui reste aujourd'hui l'apanage de l'opérateur.
Et selon vous, le numérique peut aussi bouleverser les télécoms via les terminaux ?
Début juin, nous avons relancé nos ateliers de prospective. Un des thèmes était : à quoi ressemblera un terminal dans 5 ou 10 ans ? Or, il y a deux phénomènes concomitants qui pourraient provoquer une énorme rupture dans la relation avec les opérateurs télécoms : la commande vocale et les chat bots. Combinés, ils permettent d'utiliser sa voix pour appeler son agent conversationnel plutôt que de cliquer pour surfer. On peut très bien imaginer acheter un agent domestique intelligent dont le fournisseur va, lui, acheter de la connectivité à des opérateurs télécoms, sur un marché de gros ! Et la régulation par la data est justement un axe de développement structurel pour l'Arcep en tant que régulateur d'un secteur télécoms
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