Prise de parole - Interview

« Le très haut débit est essentiel » : interview du président de l'ARCEP au Républicain Lorrain le 9 octobre 2009

Quel jugement portez-vous sur le réseau mosellan ?
Jean-Ludovic SILICANI, président de l’Autorité des communications électroniques et des postes (Arcep) : «Je suis impressionné. La Moselle est un des deux ou trois départements français les plus en avance. J’habite dans le centre de Paris et je n’ai pas accès à la fibre optique alors que les habitants du secteur de Bitche l’auront dans trois mois.»

Trouvez-vous normal que ce soit aux collectivités d’organiser ces réseaux ?
«C’est utile dans les endroits ruraux où les opérateurs ne pourraient pas équiper un secteur en situation de concurrence et de rentabilité. Il y aurait alors le choix entre rien, et ce qui se fait en Moselle avec un financement local. Pour le haut débit, près de cent réseaux publics ont ainsi été réalisés depuis cinq ans.»

Les technologies avancent tellement vite qu’on a l’impression qu’on ne réduira jamais la fracture numérique. Comment faire ?
«Dans les trois ans qui viennent, les zones très denses devraient être équipées en fibre optique. Dans les zones peu denses, il faut s’appuyer sur les réseaux d’initiatives publiques. Un fonds national pour le numérique pourrait être créé pour les y aider. Enfin, l’initiative privée peut équiper les zones moyennement denses, mais pas en situation de concurrence. Il faut un réseau concurrentiel, mais mutualisé. Le gouvernement essaye de convaincre les opérateurs.»

Le haut débit est à peine accessible, et on parle déjà du très haut débit. Est-ce nécessaire ?
«C’est le grand enjeu des dix prochaines années. Le débit sera quasiment infini. Les échanges d’informations classiques iront plus vite, pourront être complétés par des données de toute nature. Ça va développer le télétravail, modifier l’enseignement, la médecine, le commerce entre les entreprises. Ces investissements, plusieurs dizaines de milliards d’euros sur les dix prochaines années, pourraient générer une période de croissance générale. Comme cela avait été le cas à la Belle Epoque, suite au développement des chemins de fer. C’est donc essentiel. On espère que l’emprunt d’Etat en 2010 y consacrera un volet substantiel pour accélérer ce financement.»

Par rapport aux autres pays, où se situe la France ?
«Le Japon et la Corée sont très en avances. Les Etats-Unis sont en retard sur le haut débit mais ont déjà fait un petit peu de très haut débit. En Europe, on est à un très bon niveau sur le haut débit, mais on n’a quasiment pas démarré sur le très haut débit. L’objectif est que la France intègre le peloton de tête.»

Ph. M.