Communiqué de presse - Réseaux fixes

Fibre Optique

Modalités tarifaires de l’accès au réseau en fibre optique de XpFibre : la Cour d’Appel de Paris confirme deux décisions de règlement de différend de l’Arcep


Dans un arrêt du 20 avril 2023, la Cour d’Appel de Paris confirme la décision de règlement de différend de l’Arcep concernant les conditions tarifaires de l’accès de Bouygues Telecom aux réseaux mutualisés en fibre optique jusqu’à l’abonné exploités par SFR FTTH (devenue XpFibre).

Saisie en règlement de différend par Bouygues Telecom concernant les conditions tarifaires d’accès aux lignes en fibre optique exploitées par SFR FTTH (devenue XpFibre), en dehors des zones très denses, au sein de la zone dite « SFMD »[1], la formation de règlement des différends, de poursuite et d’instruction de l’Arcep (RDPI) avait rendu une décision le 5 novembre 2020[2]. La formation RDPI avait imposé à SFR FTTH de proposer à Bouygues Telecom un avenant au contrat d’accès à ses lignes en fibre optique en zone SFMD par lequel devaient être rétablis, à compter du 1er février 2020, les tarifs de cofinancement en vigueur avant cette date, et par lequel le tarif de location passive à la ligne n’excèderait pas 13,20 euros par mois par ligne, avec effet à compter du 3 janvier 2020.

SFR FTTH a fait appel de cette décision devant la Cour d’Appel de Paris. Dans un arrêt publié le 20 avril 2023, cette dernière confirme la décision de l’Arcep :

  • La Cour rejette les moyens de SFR FTTH qui remettaient en question l’impartialité de la formation RDPI et de son président au cours de la procédure de règlement de différend.
  • Concernant la suppression des hausses tarifaires des différentes modalités d’accès au réseau en fibre optique de SFR FTTH prévues à compter du 1er février 2020 : la formation RDPI avait notamment considéré que les éléments fournis par SFR FTTH ne permettaient pas de justifier l’augmentation de ses tarifs de cofinancement, ni d’apprécier la réalité des surcoûts allégués. Au regard du cadre règlementaire et du besoin des opérateurs commerciaux de bénéficier de modalités d’accès garantissant un accès pérenne aux réseaux en fibre optique, la hausse tarifaire mise en œuvre par SFR FTTH a été regardée comme ni justifiée ni raisonnable. La Cour d’Appel de Paris confirme le raisonnement de la formation RDPI. Elle note notamment que SFR FTTH « a refusé de fournir les données relatives à ses coûts pourtant demandées […] ». La Cour estime qu’il ne pouvait en invoquer le caractère confidentiel dès lors qu’il lui était loisible de les présenter de manière « suffisamment agrégée » pour permettre leur communication. Elle souligne que « [s]i les principes d’objectivité et de transparence n’impliquent pas l’obligation pour l’[opérateur d’infrastructure] de justifier auprès de l’opérateur commercial du détail de l’ensemble de ses coûts, ils impliquent à tout le moins, en cas d’évolutions tarifaires, que l’[opérateur d’infrastructure] communique aux [opérateurs commerciaux] présents sur son réseau les éléments objectifs justifiant les évolutions de coûts ».
  • Concernant la baisse du tarif de location mensuelle à la ligne fixé par SFR FTTH : la formation RDPI avait estimé qu’au regard du cadre réglementaire et en particulier du principe d’échelle des investissements, l’opérateur d’infrastructure doit proposer plusieurs modalités d’accès (cofinancement et location) avec une distinction tarifaire entre ces modalités d’accès cohérente afin de préserver les incitations au cofinancement tout en restant maîtrisée pour permettre à  des opérateurs commerciaux en location d’entrer sur le marché. Le caractère raisonnable du tarif de location passive à la ligne a ainsi été apprécié au regard de l’écart tarifaire entre les offres de cofinancement et de location ; la formation RDPI a considéré que le tarif -contesté- de location passive à la ligne de 16,40 € HT/mois/ligne était déraisonnable et que la borne haute de l’intervalle tarifaire demandé par Bouygues Telecom, à savoir 13,20 € HT/mois/ligne, était raisonnable. Sur ce point, la Cour confirme également le raisonnement de la formation RDPI et relève que c’est « à juste titre que l’Autorité a considéré que le tarif de location devait être apprécié au regard de celui du cofinancement afin de vérifier que l’écart entre les deux traduise le principe de l’échelle des investissements, et partant le caractère raisonnable du tarif de location ». Elle valide également l’utilisation, pour trancher le différend, du modèle de tarification publié par l’Arcep en 2015[3].  

Dans un autre arrêt du 20 avril 2023, la Cour d’Appel de Paris confirme la décision de règlement de différend de l’Arcep concernant les conditions de l’accès de Free aux réseaux en fibre optique de SFR FTTH en zones moins denses d’initiative privée

Également saisie par Free d’un règlement de différend concernant les conditions dans lesquelles il accède aux réseaux en fibre optique de SFR FTTH dans la zone SFMD (les demandes tarifaires portent exclusivement sur la partie de la zone AMII comprise au sein de la zone SFMD), la formation RDPI avait rendu une décision le 17 décembre 2020[4]. SFR FTTH a fait appel de cette décision devant la Cour d’Appel de Paris. Dans un arrêt publié le 20 avril 2023, cette dernière confirme la décision de l’Arcep :

  • La Cour rejette également les moyens de SFR FTTH qui remettaient en question, de nouveau dans cette affaire, l’impartialité de la formation RDPI et de son président.
  • Sur les demandes relatives à la pérennité des droits d’usage : la formation RDPI avait estimé que le contrat de SFR FTTH ne fournissait pas les garanties suffisantes en matière de prévisibilité et de transparence concernant le maintien des droits d’usage en cas de transfert du réseau ou de changement capitalistique, imposant à SFR FTTH de proposer à Free un projet de contrat modifié prévoyant notamment que la continuité des droits d’usage et des conditions essentielles d’accès soit assurée, avec une juste indemnisation de la société Free en cas de résiliation ou perte de tout ou partie de ces droits d’usage ou conditions essentielles d’accès. Sur ce point, la Cour valide le raisonnement de la formation RDPI estimant notamment que « l’insertion d’une clause d’indemnité participe […] de l’effectivité du maintien des droits d’usage et apporte à l’opérateur cofinanceur des garanties quant aux conditions d’accès au réseau déployé en contrepartie de son cofinancement pour lui permettre de rentabiliser son investissement ».
  • Sur la demande d’encadrement de la faculté de SFR FTTH de modifier unilatéralement ses tarifs : pour la formation RDPI, le statut particulier de cofinanceur de Free impliquait que celui-ci dispose d’une prévisibilité et d’une transparence adéquates, ainsi que de la visibilité nécessaire lui permettant d’apprécier le caractère raisonnable des évolutions tarifaires envisagées. Elle avait ainsi imposé à SFR FTTH de proposer à Free un mécanisme contractuel, pour la zone concernée par le règlement de différend, visant à ce qu’au-delà d’un seuil à définir par le contrat, l’évolution tarifaire envisagée fasse l’objet d’un avenant négocié de bonne foi entre les parties. Sur ce point la Cour d’appel de Paris valide une nouvelle fois le raisonnement de la formation RDPI en estimant notamment qu’elle « a fait une exacte application des principes de transparence et d’objectivité en vertu desquels la tarification mise en œuvre par l’[opérateur d’infrastructure] doit pouvoir être justifiée à partir d’éléments de coûts clairs et opposables et toute évolution tarifaire être justifiée par des éléments objectifs ».
  • Sur la demande concernant les tarifs de SFR FTTH : en application du cadre réglementaire, la formation RDPI, au regard des éléments produits par les parties dans le cadre de l’instruction et, compte tenu de ses propres évaluations, avait imposé à SFR FTTH d’ajuster ses tarifs dans la partie AMII de la zone « SFMD »au niveau demandé par Free, c’est à dire, un tarif de cofinancement ab initio par ligne ne dépassant pas 513,6 € et une redevance mensuelle par ligne ne dépassant 5,12 € pour un cofinancement à hauteur de 20 %. La Cour d’Appel de Paris confirme la décision de la formation RDPI dans son ensemble. A cet égard, elle valide l’utilisation, pour trancher le différend, des modèles de coûts de boucle locale optique mutualisée et de tarification de l’Arcep, qui ont été à plusieurs reprises mis en consultation publique et relève de nouveau que SFR FTTH s’est abstenu de fournir ses coûts de déploiement, « fût-ce de manière agrégée » pour justifier du caractère raisonnable de ses tarifs.

Documents associés :

Arrêt de la Cour d’Appel de Paris - Règlement de différend de l’Arcep concernant les conditions tarifaires de l’accès de Bouygues Telecom aux réseaux mutualisés en fibre optique jusqu’à l’abonné exploités par SFR FTTH

Arrêt de la Cour d’Appel de Paris - Règlement de différend de l’Arcep concernant les conditions de l’accès de Free aux réseaux en fibre optique de SFR FTTH en zones moins denses d’initiative privée

 


[1] La zone « SFMD » correspond au périmètre suivant sur lequel SFR FTTH intervient en tant qu’opérateur d’infrastructure :

  • les communes issues des déploiements historiques de SFR dans le cadre des appels à manifestation d’intention d’investissement, zone dites « AMII » (Ne sont donc pas concernées par le présent différend les communes cédées par Orange au bénéfice de SFR dans le cadre de l’accord de repartage de la zone AMII conclu en 2018) ;
  • les zones issues des engagements pris par SFR dans le cadre des appels à manifestation d'engagements locaux (AMEL).

[2] Communiqué de presse de l’Arcep en date du 18 novembre 2020 et décision n° 2020-1168-RDPI de l’Arcep en date du 5 novembre 2020

[3] L’Arcep a publié en 2015 des éléments d’orientation sur la tarification en zones moins denses, constitués d’un modèle et de son document d’accompagnement : https://www.arcep.fr/uploads/tx_gspublication/modele_PRDM-PTO.xlsx ; https://www.arcep.fr/uploads/tx_gspublication/doc-model-tarif-acces-ftth-oct2015.pdf

[4] Communiqué de presse de l’Arcep en date du 4 janvier 2021 et décision n° 2020-1498-RDPI de l’Arcep en date du 17 décembre 2020