Prise de parole - Discours

Territoires connectés

Retrouvez en intégralité le discours de Laure de La Raudière, présidente de l’Arcep prononcé lors de la conférence annuelle « Territoires connectés » le 30 septembre 2025 à l’Institut du Monde arabe.

Seul le discours prononcé fait foi

« Mesdames et Messieurs les parlementaires,

Mesdames et Messieurs les élus, les représentants des collectivités, des opérateurs,

Mesdames et Messieurs,

Je suis très heureuse de vous retrouver aujourd’hui, avec mes collègues membres du collège de l’Arcep et avec les équipes de l’Arcep pour notre rendez-vous « Territoires Connectés » sur l’aménagement numérique du territoire.

93% des locaux sont raccordables à la fibre, les zones rurales ont presque rattrapé les zones très denses et les zones AMII, et continuent leur déploiement à bon rythme. A la fin de l’année, nous serons peu ou prou à 95% de couverture toutes zones confondues.

On pourrait dire : ça y est, nous sommes à la fin. En fait, nous sommes à un moment clé de ce grand projet avec quatre enjeux majeurs pour que son achèvement soit exemplaire :

  • Finaliser la complétude des déploiements,
  • Passer du « raccordable » au « raccordé » à la fibre,
  • Veiller sur les conditions d’exploitation des réseaux FttH, en particulier en zone d’initiative publique
  • Assurer la fermeture du réseau cuivre historique dans de bonnes conditions,

Tout ceci doit se faire en outre avec un niveau de qualité à la hauteur des attentes des français ! La dernière édition de l’observatoire de l’Arcep révèle que l’amélioration de la qualité, perceptible sur la majorité des réseaux, semble se confirmer. C’est une bonne nouvelle, mais il reste encore beaucoup à faire : les efforts de la filière doivent être maintenus et l’Arcep y sera particulièrement vigilante. J’en ai souvent parlé, je ne m’y attarde pas, mais je ne doute pas que la table ronde de cet après-midi sur les enjeux du fixe ne manquera pas d’y revenir.

Les 4 enjeux que je viens de citer sont au cœur de la stratégie de l’Arcep présentée en janvier 2025. Et je veux en détailler quelques points en introduction de nos travaux.

1er enjeu : finaliser les déploiements.

Ce n’est pas une option, mais une obligation réglementaire, notamment dans la perspective de la fermeture du réseau cuivre.

Nous y veillerons, nous avons d’ailleurs mis en demeure plusieurs opérateurs de respecter leur obligation de complétude des réseaux fibre. Après échanges et consultation publique, nous avons publié cette année une recommandation sur nos attentes en matière de complétude.

Des clarifications sont ainsi apportées sur la notion de refus et blocages ne relevant pas de la responsabilité de l’opérateur d’infrastructure, la notion de gel commercial… Le respect de ces bonnes pratiques permettra de vérifier le respect des obligations de complétude.

2ème enjeu : passer du raccordable au raccordé 

Enjeu majeur, crucial pour assurer le succès du plan France Très Haut Débit. Enjeu bien complexe à mesure que l’on arrive vers la fin des déploiements.

L’Arcep a rappelé en 2023 la responsabilité de l’opérateur d’infrastructure dans la réalisation des raccordements complexes sur le domaine public, jusqu’au droit du terrain, et elle a rappelé aussi qu’il n’est pas illégitime que ces travaux fassent l’objet d’une tarification spécifique.

Mais le passage du statut de « raccordable » à « raccordé » échoue aussi bien souvent du fait de travaux parfois très onéreux, à faire par les propriétaires sur le domaine privé.

Je me réjouis donc de la publication, mercredi dernier, de l’arrêté ministériel créant le dispositif expérimental de soutien aux ménages pour les travaux de raccordement en zone privative, pour les locaux inclus dans les lots 1 et 2 de fermeture du réseau cuivre. C’est une mesure importante, et l’expérimentation est la bienvenue pour voir si le dispositif créé est adapté et permet de lever les freins à la souscription de la fibre pour les personnes concernées.

Autre bonne nouvelle, celle-ci pour le raccordement des immeubles neufs : les nouvelles versions des formulaires Cerfa pour les demandes de permis de construire intègreront en 2026, le renseignement sur les besoins en raccordement au réseau fibre. Cela semble un détail, mais c’est un détail assez essentiel pour que les opérateurs d’infrastructure soient assurés d’être dans la boucle des projets de construction, le plus tôt possible.

3ème enjeu : les conditions d’exploitation des réseaux FttH, en particulier en zone d’initiative publique

C’est une préoccupation essentielle des collectivités, l’Arcep en a bien conscience. Nous avons donc initié un travail important afin d’objectiver les coûts du maintien en conditions opérationnelles des réseaux en fibre optique en zone d’initiative publique. Mettre de la transparence et des références de coûts pour partager une base commune sur les coûts d’exploitation, afin de faciliter les discussions entre les acteurs, tel est l’objectif de notre travail. La consultation publique ouverte jusqu’au 10 octobre vise à identifier les indicateurs de coûts pertinents et à recueillir des éléments de coûts de la part des opérateurs. Sur cette base, nous serons en mesure de partager un modèle de référence des coûts, afin de faciliter le renouvellement des délégations de service public et les négociations entre acteurs.

4ème enjeu : Assurer la fermeture du réseau cuivre historique dans de bonnes conditions

La fermeture du réseau cuivre est un projet structurant pour la filière : nous veillerons à ce que ce chantier se passe bien pour les Français – et c’est bien sûr au respect de la complétude auquel je pense – , qu’il se passe bien pour les entreprises – et c’est à la disponibilité effective des offres adaptées à leurs besoin auquel je pense et enfin qu’il se passe bien d’un point de vue concurrentiel pour le secteur.

Au 31 mars 2025, 75% des abonnements Internet filaires étaient sur la fibre, c’est + 4 points par rapport au trimestre précédent. Cette dynamique traduit l’appétence des Français pour la fibre, et c’est une très bonne nouvelle dans la perspective de la fermeture du réseau cuivre.

En janvier dernier, un premier lot a été fermé techniquement, avec succès : l’engagement de tous, opérateurs et collectivités a permis cette réussite.

C’est par le respect des conditions de fermeture, le partage des informations entre tous, et la communication que nous ferons tous ensemble un succès collectif des prochaines étapes, en janvier prochain, avec la fermeture technique d’environ 880.000 locaux et la fermeture commerciale de 70% des lignes cuivre. C’est important pour la rentabilité des investissements effectués par tous, dans les déploiements de la fibre et c’est essentiel aussi pour les français.

Puisque nous parlons fermeture de réseaux, nous avons aussi un autre challenge devant nous, celui de réaliser la fermeture des réseaux 2G et 3G dans de bonnes conditions.

Les opérateurs ont choisi de fermer progressivement les réseaux mobiles 2G et 3G, à partir de fin 2026. Cette tendance est mondiale ; elle est motivée par des raisons économiques, environnementales aussi ; et permet un renforcement de la sécurité des réseaux.

Les obligations des opérateurs étant attachées aux fréquences et non à la technologie, la fermeture des réseaux 2G et 3G ne devraient donc pas avoir d’incidence sur la couverture des réseaux mobiles. L’enjeu réside surtout à la migration des équipements 2G ou 3G, non compatibles avec la 4G ou la 5G. Afin d’en suivre l’évolution, l’Arcep a enrichi son observatoire de suivi des cartes SIM. Au deuxième trimestre 2025, il reste 5,9 millions de cartes SIM dans des terminaux compatibles uniquement « 2G » et «3G/2G », objets connectés compris. L’Arcep est particulièrement attentive aux actions mises en œuvre par les opérateurs auprès de leurs clients pour les sensibiliser à ces fermetures, pour proposer des offres adaptées à leurs besoins et, le cas échéant, les accompagner dans les actions nécessaires pour anticiper cet arrêt.

Mais au-delà des enjeux de la connectivité dont nous parlons souvent ensemble : cette année, nous avons souhaité mettre en avant l’enjeu de l’accès des collectivités aux infrastructures numériques que sont l’accès aux données et au cloud.

Pour penser l’aménagement numérique du territoire, il faut aussi penser l’accès au cloud et aux données, pour les collectivités et les entreprises. Un peu comme dans le domaine des télécoms, notre ambition pour l’accès au cloud est de créer un cadre de régulation qui favorise la concurrence et permette la liberté de choix, et en particulier le choix d’offres souveraines. Olivier Delclos vous présentera la synthèse de nos travaux sur ce sujet.

En matière de données, l’Arcep a labellisé en 2025 deux prestataires de services d’intermédiation de données. Neuf se sont notifiés auprès de nous, soit environ le tiers de l’ensemble des intermédiaires de l’Union européenne. C’est un nouveau statut qui crée un cadre de confiance, technique et contractuel, pour mettre en relation des détenteurs de données avec des utilisateurs de données, afin que ceux-ci puissent développer de nouveaux services, fondés sur cet échange de données.

Ces services se développent dans le monde aéroportuaire, spatial, des prêts immobiliers, mais je ne doute pas que des cas d’usage intéressants existent avec les nombreuses données dont disposent les collectivités. J’espère que la table ronde sur ce sujet enrichira vos réflexions sur le partage de données au bénéfice de nos territoires.

Mesdames et Messieurs,

Il est temps de passer à nos travaux. L’année 2025 est la première année de mise en œuvre de la nouvelle stratégie de l’Arcep, « Ambition 2030 ». La conférence « Territoires connectés », ouverte à de nouveaux sujets (cloud et données en particulier) et de nouveaux acteurs est aussi un symbole de cette évolution de l’Arcep des télécoms aux infrastructures numérique plus largement.

L’ensemble des chantiers évoqués sont les premiers fruits de notre stratégie, pour permettre à l’ensemble de nos concitoyens et des entreprises de disposer des infrastructures numériques partout, pour tous et pour longtemps.

Je vous remercie. »

Laure de La Raudière, présidente de l’Arcep