Prise de parole - Interview

"Opérateurs télécoms: les bons et les mauvais élèves selon l'Arcep" - Interview de Sébastien Soriano, président de l'Arcep, à Challenges

Dans l'étude sur la qualité des opérateurs présentée par l’Autorité de régulation des télécoms (Arcep) ce 12 juillet 2016, les réseaux et les services mobiles sont passés au crible. Son président Sébastien Soriano explique pourquoi Orange est leader, alors que Free est à la traîne. Il veut convaincre les consommateurs de se référer à ces données avant de faire leur choix.


Que faut-il retenir de votre étude ?


L’enseignement principal de cette étude est qu’il existe des différences importantes entre les opérateurs en matière d’investissements et de stratégies. Certains pratiquent des prix très bas, d’autres choisissent d’investir dans les réseaux. Ce constat nous conforte dans la stratégie de régulation par la data que nous développons à l’Arcep afin de permettre au consommateur de choisir en connaissance de cause. Il comprend ce que vaut un prix, les différences de qualité.

Notre mission historique, c’est d’obliger les opérateurs à faire des choses pour obtenir un équipement minimal sur l’ensemble du territoire. Mais nous voulons aussi avoir un rôle d’incitation, pour aller plus loin, en mettant sur la table les informations nécessaires pour comparer. Nous publions de plus en plus de données sur la qualité du réseau, selon si vous habitez en zone urbaine ou rurale. Nous avons réalisé un outil cartographique sur les trains. On voit que certains opérateurs se sont lancés dans des campagnes d’investissement pour les TGV, d’autres pas. Fin 2016, début 2017, nous développerons la cartographie sur l'ensemble du territoire.


Quel est le grand gagnant 2016 ?

Les résultats font apparaître un gagnant assez clairement: l’opérateur historique Orange. Nous ne cherchons pas à comparer les niveaux d’investissement (SFR revendique atteindre le même niveau d'investissement qu'Orange, ndlr) ou les messages de communication des opérateurs, mais la qualité finale du réseau. Car les méthodes d’évaluation de l’investissement en euros ne sont pas les mêmes chez tous les opérateurs. C’est d’abord une notion comptable qui ne correspond pas à la qualité perçue par les Français. Notre rôle d’arbitre est de dire qui est le vainqueur d’une course loyale et de veiller à ce que chacun ait les capacités de se battre dans la concurrence à armes égales.


La couverture 4G du territoire français est estimée à 35%, n'est-ce pas insuffisant ?

Oui, avec 75% de la population couverte, la France est seulement 24ème du classement européen, ce qui n’est pas satisfaisant. J’ai appelé à une véritable relance de l’investissement il y a dix jours. Si le secteur se mobilise, il peut viser 98% de la population d’ici 3 ans et 90% du territoire.


Comment faire pour pousser Free, dernier du classement, à investir ?

En tant que gendarme des télécommunications, nous pouvons utiliser les obligations existantes dans les licences, nous les ferons respecter quoiqu’il arrive. Nous avons aussi poussé les acteurs à organiser l’extinction de l’itinérance, pour aller vers une trajectoire d’investissement de l’industrie mobile. Tous les opérateurs devront s’y mettre.