Gabrielle Gauthey, de l'ART recommande la création de réseaux par les collectivités locales.
Où en est la France sur le plan du haut débit ?
Le retard français a longtemps été stigmatisé. Mais la situation a beaucoup évolué au cours des dix-huit derniers mois. France Télécom a fait un important effort de couverture du territoire et prévoit d'atteindre 96 % de la population fin 2006. La couverture des zones peu denses est donc un problème moins aigu.
L'intervention des collectivités locales sur le marché du haut débit reste-t-elle justifiée ?
Ce n'est pas parce qu'il y a moins de problèmes de couverture que le développement du haut débit est homogène ! Seule la moitié de la population française a accès à la concurrence dans le haut débit grâce au dégroupage. Or la compétitivité d'un territoire dépend de la diversité des offres et des tarifs disponibles. Grâce à la concurrence, les PME peuvent obtenir des tarifs plus avantageux pour leurs offres haut débit, de l'ordre de 30 %. L'intervention des collectivités locales est légitime dès lors qu'il s'agit de mettre à disposition des opérateurs des infrastructures mutualisables pour favoriser l'arrivée de la concurrence, sans intervenir sur le marché de détail.
Est-ce à dire qu'il y a une nouvelle fracture numérique ?
Il y a de plus en plus de disparités entre les zones dégroupées où sont présents plusieurs opérateurs et celles où seul France Télécom est présent. Dans ces dernières, les clients n'ont pas accès à l'ensemble des offres alliant téléphonie, télévision et Internet à haut débit. En devenant opérateurs " de gros ", les collectivités locales auront les moyens de permettre aux opérateurs alternatifs d'étendre la diffusion de leurs propres services à travers le dégroupage. L'attractivité économique des zones non accessibles aux fournisseurs d'accès à Internet en dépend.
Quels montants les collectivités locales sont-elles prêtes à investir dans le haut débit ?
On compte aujourd'hui plus de 100 projets d'établissement par les collectivités locales de projets de réseaux mutualisables, dont 45 sont en phase de lancement. Les projets lancés par les départements portent sur des montants de 30 à 45 millions d'euros. Les collectivités locales peuvent assumer en général près de 70 % du risque financier.
N'y a-t-il pas un risque que les deniers publics ne soient pas toujours bien utilisés ?
Les collectivités sont les mieux à même d'appréhender les besoins de leur territoire. Dans les projets, elles ont en général fait un recensement précis des infrastructures mobilisables, dialogué avec les opérateurs pour évaluer leurs besoins et leurs objectifs de déploiement. Certaines ont déjà déployé des réseaux et l'on peut déjà mesurer le retour indirect sur le tissu économique local.
La multiplicité des projets lancés ne risque-t-elle pas d'entraîner des redondances ?
Non, s'il s'agit de créer le chaînon manquant entre la boucle locale et les artères régionales, et donc de proposer aux opérateurs une offre de gros aujourd'hui inexistante ou moins adaptée. L'Autorité de régulation des télécommunications est là pour leur apporter son expertise.
Propos recueillis par Guillaume de Calignon et Sophie Sanchez