" Les collectivités ne peuvent exploiter commercialement la fibre noire "
Roger CHINAUD, membre de l'Autorité de régulation des télécommunications, annonce qu'après plusieurs mois de gestation, un projet de circulaire précisant notamment les limites entre groupements fermés d'utilisateurs et réseaux ouverts devrait être publié, rappelant les compétences des collectivités territoriales.
Question : Comment analysez-vous l'implication des collectivités locales dans les nouvelles technologies au regard de la loi de 1996 ?
Roger Chinaud : les communications représentent souvent, pour les villes, la deuxième ligne de leur budget par ordre d'importance. Maintes collectivités locales, avant le vote de la loi de 1996 et l'installation de l'ART, ont consulté France Telecom pour bénéficier des mêmes avantages que certaines entreprises. On les a prié de " patienter ". Mais la préparation de cette loi a servi de relance..et un certain nombre de collectivités locales ont pris des initiatives.
Question : les risques ne se sont-ils pas démesurément amplifiés ?
Roger Chinaud : effectivement, des mises en garde s'imposent. Au niveau des engagements financiers, il y a un " gap " important entre le fait de créer son réseau fermé d'utilisateurs entre centres administratifs et le fait de créer un service téléphonique ouvert au public. A cela s'ajoute la manière d'utiliser les deniers publics. Puisqu'on ouvre la concurrence, pourquoi créer de nouveaux mini-réseaux publics ? On ne peut que dire non à un certain nombre de tentatives en l'état actuel du droit ou alors il convient de changer le code des communes...!
Question : Comment résumer le point de vue de l'ART sur le sujet ?
Roger Chinaud : les villes peuvent gérer un service public si la loi leur en donne compétence ou s'il y a une carence de l'initiative privée. Il faut que cette carence soit manifeste. L'exploitation commerciale par une collectivité locale d'un service de télécommunication ne fait pas partie du service public et ne peut, a fortiori, faire l'objet d'une délégation de service public. Voilà l'état du droit. La problématique du risque existe. Notre avis, c'est que les textes de loi successifs et la jurisprudence du Conseil d'Etat ne permettent pas d'aller jusque là.
Question : Et qu'en est-il sur le terrain ?
Roger Chinaud : Marseille, Roubaix, La Courly par exemple ont modifié leurs orientations. La Ville de Paris, dans la société Paris TV Câble revend sa part, soit le quart du capital. Entre temps, nous avons autorisé l'installation d'Internet sur le câble. Nous sommes saisi de demandes d'utilisation du câble pour le téléphone. Les techniques s'imbriquent tellement et évoluent si vite que les collectivités doivent travailler autrement.
Question : Comment, à votre connaissance, les collectivités appliquent-elles les décrets sur l'occupation de l'espace public et assurent-elles une coordination technique entre opérateurs?