ZDNet : Dans sa récente réorganisation internet, l'ART s'est désormais dotée d'un service "collectivités et régulation des marchés haut débit". S'agit-il de contrôler les collectivités qui veulent devenir opérateurs télécoms ?
Philippe Distler : Non. L'objectif de ce service n'est bien évidemment pas de contrôler spécifiquement les collectivités qui développent des projets en matière de télécommunications. Elles sont déjà soumises à de nombreux contrôles par ailleurs. Je crois que l’ART, du fait de sa connaissance du secteur et de sa neutralité, est susceptible d’apporter aux collectivités qui le souhaitent une vraie valeur ajoutée, en les accompagnant dans leur démarche. L’Unité collectivités au sein du service haut débit, est composée de cinq personnes; elle interviendra dans ce rôle, qui s’il est stricto sensu en dehors du champ de régulation " classique ", s’inscrit bien dans les missions générales de l’ART. Je vous rappelle d'ailleurs que les collectivités n'auront bien évidemment pas à demander un avis préalable au régulateur pour devenir opérateur. Elles seront cependant soumises, en tant qu’opérateur, au règles du code des communications électroniques. En particulier en cas de litige, l’ART pourra être saisie en règlement de différend.
Quel est selon-vous l'enjeu de l'arrivée des collectivités sur le marché des opérateurs ?
Les collectivités ont un rôle essentiel à jouer pour réduire la fracture numérique en France. Les infrastructures mutualisables qu’elles vont déployer en tant qu’opérateur d’opérateurs, vont permettre un déploiement plus rapide et plus large du haut débit pour les entreprises et les particuliers, que ce que le jeu normal des acteurs aurait permis. Cela n'empêchera nullement la concurrence sur les services, par l’innovation et les prix, au contraire. Je suis convaincu que l'aménagement numérique du territoire n'est pas incompatible avec le développement de la concurrence.
Plus généralement, pourquoi avoir modifié l'organisation interne de l'ART ?
Nous voulions coller plus près à la réalité du marché afin de répondre précisément aux demandes de chaque segment du secteur des télécommunications. Plutôt que de nous organiser strictement par pôles de compétences comme auparavant, nous avons mis l’accent sur l’efficacité opérationnelle, en créant, pour partie, une structure en " business units " dans la nouvelle organisation. Il s'agit de répondre au nouvel environnement communautaire qui demande à chaque régulateur d'analyser le degré de concurrence par marché, et d’adapter son intervention à la situation concurrentielle de chaque marché, dans une perspective d’allègement et de convergence à terme vers le droit commun de la concurrence.
Propos recueillis par Christophe Guillemin