Gabrielle Gauthey : "L'entrée dans le champ des télécoms donne
de grandes responsabilités aux collectivités"
Après un passage à la DATAR, au cabinet de François Fillon en 1995-1997 puis à la Direction des NTIC à la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC), Gabrielle Gauthey vient d'être nommée membre du collège de l'ART. Elle fait le point sur les principaux sujets d'actualité.
Autoroutes & Territoires de l'information : Quels sont vos dossiers prioritaires à l'ART ?
Gabrielle Gauthey : Les membres du collège sont en principe concernés par tous les sujets et notamment par les trois projets de loi en cours de préparation ou déjà déposés : la loi sur la confiance dans l'économie numérique (LEN), la loi sur la régulation postale et la transposition en droit français du "paquet télécom" européen. Personnellement, je m'intéresse également au développement de l'internet haut débit, fixe et mobile, notamment à travers l'action des collectivités territoriales.
- Est-ce parce que les collectivités territoriales deviennent des acteurs clé pour le haut-débit ?
- Aujourd'hui personne ne peut ignorer la contrainte territoriale. La loi de 96 qui avait permis l'entrée de nouveaux opérateurs, a fait apparaître l'existence de zones mal desservies, nécessitant une intervention publique forte. A la Caisse des Dépôts j'ai beaucoup milité pour le renforcement des pouvoirs d'intervention des collectivités territoriales, dont la philosophie vise à faire exister une alternative et à organiser la concurrence sur les territoires défavorisés.
- Dans quel esprit l'ART participe à la réflexion législative sur le haut-débit ?
- En recherchant des solutions de régulation simples, pour préserver les dynamiques locales. Le dépôt d'un amendement gouvernemental (L1425-1) dans le cadre du vote de la loi sur l'économie numérique, sans préjuger de sa forme définitive, va élargir le champ d'action des collectivités territoriales. Son application devra privilégier la rapidité d'intervention, donc demeurer faiblement procédurière. La loi propose un véritable mode d'emploi, sur les précautions à prendre en cas d'intervention directe, comme la publicité vis à vis des opérateurs, ou la mise en cohérence avec les autres niveaux territoriaux. Dès lors, le constat de carence qui ralentissait le processus, peut s'effacer au profit d'une simple démonstration d'absence d'offres. Dans le même esprit l'ART pourrait apporter un éclairage aux Préfets en matière de contrôle de légalité plutôt que de se prononcer systématiquement sur la légalité des projets. Ce point est encore en discussion et pourrait évoluer favorablement.
- Comment abordez vous le développement des technologies alternatives ?
- Notre rôle est de veiller à la mise en place de conditions de concurrence équitables et d'une desserte équilibrée des territoires en matière de haut débit. Cet objectif dépend aussi de la diversification des offres, y compris à travers des technologies telles que le Wi-fi ou le satellite. Nous sommes donc très favorables à leur développement. N'oublions pas le câble qui peut constituer aussi un vecteur de diversification et d'accélération du haut-débit, d'autant que la transposition du " paquet télécom " va alléger les contraintes qui pesaient sur son développement.
- En somme le paysage s'éclaircit pour le haut-débit
- Certes beaucoup reste à faire. Nous travaillons, par exemple, en ce moment, avec la Commission pour clarifier les modalités d'utilisation des fonds Feder sur le volet télécom. Mais l'évolution est déjà perceptible. Le face à face France Télécom, Cegetel, Ldcom tend à s'estomper avec l'apparition de nouveaux consortium réunissant, un gestionnaire d'infrastructures, une entreprise du BTP et un opérateur de services (Maine-et-Loire). L'ouverture imposée par les collectivités sur les infrastructures, favorise l'apparition d'opérateurs locaux (Nancy). Le processus de transformation est amorcé. Il va libérer les énergies locales au bénéfice de tous, y compris du marché.
Propos recueillis par Philippe Parmantier et Luc Derriano