La Commission européenne mène actuellement une consultation publique sur l’avenir des politiques en matière de cloud et d’intelligence artificielle dans l’Union européenne : l’Arcep publie ce jour sa contribution. Dans celle-ci, elle appelle à une régulation ex-ante du cloud et de l’IA à l’échelle européenne, pro-investissement, s’inspirant des succès de la régulation des télécoms en France, qui lui vaut d’être classée premier pays européen sur la part d’abonnements supérieurs à 1 Gigabits par le dernier classement de la Commission européenne.
Les 25 et 26 juin derniers, Laure de La Raudière, Présidente de l’Arcep, a rencontré à Bruxelles des parlementaires européens pour défendre cette position.
Une régulation claire et stable offre la prévisibilité nécessaire à des investissements de long terme
S’appuyant sur son expérience de régulation pro-investissement dans les réseaux télécoms (par exemple le co-investissement pour le déploiement des réseaux en fibre optique), l’Arcep plaide pour la création de conditions claires et stables de régulation économique du cloud et de l’IA. Elle propose également d’adopter des outils inspirés de la régulation des télécoms : suivi des investissements, transparence sur les conditions d’accès aux infrastructures, ouverture aux acteurs émergents.
« On entend actuellement une petite musique, chantant les bénéfices supposés de la dérégulation, pour favoriser les investissements... Le marché des télécoms en France nous apporte la parfaite preuve du contraire : la régulation a apporté stabilité et prévisibilité, mutualisation et efficacité, innovation et compétitivité des prix. Une régulation européenne économique du cloud et de l’IA est nécessaire pour apporter ce cadre de confiance. » déclare Laure de La Raudière, présidente de l’Arcep.
Sur le plan environnemental, l’Autorité par ailleurs souligne l’importance d’une mesure harmonisée des impacts du numérique à l’échelle européenne. Elle appelle à intégrer ces enjeux dans les stratégies de déploiement des centres de données. Elle propose aussi de diffuser les bonnes pratiques d’écoconception des services d’IA et plus généralement des autres services numériques, afin de prendre en compte les enjeux environnementaux du numérique « à la source » et de permettre ainsi de limiter les besoins en nouvelles capacités de stockage et en nouveaux équipements réseaux. Au-delà des bénéfices environnementaux, une régulation au service de la performance environnementale constituera un levier de compétitivité à l’échelle mondiale.
A l’ère de l’IA générative, une régulation veillant à l’ouverture du marché est nécessaire pour préserver une concurrence équitable et un cadre propice à l’innovation
Face à la montée en puissance des modèles d’IA générative agentique, l’Arcep attire l’attention sur les risques d’asymétrie entre acteurs intégrés et acteurs émergents. Elle souligne que la capacité d’interaction des nouveaux modèles avec les services numériques traditionnels (moteurs de recherche, services de cartographie, plateformes vidéo…) constitue un enjeu déterminant pour préserver l’innovation et la diversité.
La portabilité des données, la mise à disposition d’API documentées, ou encore les garanties d’accès aux ressources, sont autant d’outils de régulation pouvant être mobilisés pour ouvrir le marché de l’IA et du cloud, ne pas laisser des acteurs dominants s’imposer comme gatekeeper (contrôleurs d’accès), et permettre l’émergence d’un écosystème numérique diversifié. Une mise en œuvre agile des règlements européens Data Act et Digital Markets Act pourrait utilement servir cet objectif.
« La Commission aurait raison de désigner les géants du numérique comme des gatekeepers pour leurs services de cloud, sans quoi l’histoire va se répéter : de nouvelles barrières à l’entrée de petits acteurs innovants vont s’ériger » précise Laure de La Raudière.
La régulation de l’IA et du cloud en soutien d’une ambition européenne
L’Arcep réaffirme que la régulation est un levier essentiel de soutien à une politique économique et industrielle du numérique européen, au service de son autonomie stratégique et de la durabilité environnementale.