Consultation publique sur la société de l'information : réponse de l’Autorité de régulation des télécommunications au document de consultation publié par le Gouvernement le 5 octobre 1999

Une société de l’information pour tous
adaptation du cadre législatif de la société de l’information



La consultation publique du Gouvernement
L'intégralité de la réponse de l'ART en téléchargement

SOMMAIRE

Introduction

1. Assurer la liberté des communications en ligne, en clarifiant les droits et responsabilités de chacun

1.1. Les communications en ligne sont libres

1.2. Clarifier la responsabilité des acteurs : éditeurs, intermédiaires techniques

1.3. Assurer la régulation des contenus

1.5. Clarifier la gestion des noms de domaines sur l’Internet

1.6. Veiller à la protection des données à caractère personnel

2. Favoriser l’accès du plus grand nombre aux réseaux de la société de l’information

2.1. & 2.2. Favoriser l’accès à Internet et développer l’accès à Internet à haut débit

1. Accès à Internet à haut débit, offres de services en technologies xDSL par les opérateurs et dégroupage

2. Les évolutions du service universel

2.3. Adapter le cadre réglementaire des services de télécommunications

2.3.1. La transposition des directives communautaires

1. La directive 92/44/CE modifiée "ONP/liaisons louées"

2. La directive modifiée 97/33/CE "ONP/interconnexion"

3. La directive 98/10/CE "ONP/téléphonie vocale"

4. La directive 1999/5/CE "terminaux" et la directive 90/387/CE modifiée "ONP/cadre"

2.3.2. Les annuaires et les services de renseignements

1. Les services de renseignements

2. L'annuaire universel

2.3.3 - L’évolution du cadre législatif des services et la téléphonie sur IP

1. Perspectives de réglementation des services dans le cadre du réexamen communautaire : l’opportunité de la suppression de la catégorie "téléphonie vocale "

2. Les questions suscitées par le développement de la téléphonie sur IP

2.4. Garantir un accès aux décodeurs à des conditions équitables et non discriminatoires

2.5. Harmoniser les régimes juridiques des réseaux câblés et des réseaux de télécommunications

2.5.1 Le régime juridique des réseaux câblés

2.5.2. Un régime commun pour l'ensemble des réseaux, indépendant des services transportés

2.5.3. Une compétence générale des collectivités territoriales en matière d'infrastructures passives de télécommunications

2.6. Préparer le développement de la télévision numérique terrestre

2.7 Préparer le développement des systèmes à satellites

2.7.1 - L’utilisation de la bande 10,7-11,7 GHz

2.7.2 - Les licences pour les télécommunications spatiales

ANNEXES


Introduction

Le Gouvernement a engagé le 5 octobre 1999 une consultation publique sur l’adaptation du cadre législatif de la société de l’information. L'Autorité de régulation des télécommunications se réjouit d'une telle initiative, compte tenu des enjeux économiques et sociaux qui s'attachent au développement d'Internet et des nouvelles technologies de l'information et de la communication. L'ampleur du champ couvert par le document de consultation permettra de mieux appréhender et de résoudre une grande partie des questions juridiques que pose aujourd'hui le développement d'Internet. Il s'agit en outre d'un domaine où la pratique de la concertation est une condition indispensable du succès des réformes.

A travers le présent document, l’Autorité s’est attachée à répondre de façon précise et complète aux questions soulevées par la consultation qui intéressent le champ de la régulation des télécommunications. Les principes qui sous-tendent ces réponses et les principaux messages qui y figurent méritent d'être brièvement rappelés en préambule.

  • Appliquer le droit existant à Internet

Il convient d'abord de souligner qu'Internet est aujourd'hui, pour une large part, encadré par le droit en vigueur et en particulier par le droit des télécommunications ; celui-ci s'applique en effet aux réseaux de télécommunications qui servent de support aux services qui sont offerts sur Internet. Du point de vue des réseaux, l'unification et la simplification du cadre juridique doit être la règle dans un contexte de convergence technologique. Du point de vue des contenus, la distinction fondamentale entre correspondance privée et communication au public demeure valide sur Internet.

S'agissant des règles nouvelles qui viendront s'appliquer à Internet, l'Autorité souhaite mettre l'accent sur deux éléments :

  • le développement d'Internet ne pourra être assuré que si ces règles favorisent la liberté d'accès aux réseaux et aux services, ainsi que l'exercice d'une concurrence effective et loyale, au bénéfice du consommateur.
  • elles devront également tenir compte de la dimension internationale de la société de l'information. Ainsi, par exemple, l’achèvement de la transposition des règles communautaires en vigueur est un impératif pour permettre la mise en place d'un marché européen des télécommunications, au sein duquel Internet tend à prendre une place prépondérante, sans attendre l’aboutissement du processus de réexamen en cours.

  • Mettre en place une régulation adaptée

La régulation est l’application, par l’instance juridique compétente, d’une politique publique inscrite dans la loi. Contrairement à ce qui est parfois affirmé, Internet n'est pas aujourd'hui exempt de toute régulation. Ainsi, les activités de l'Autorité témoignent du rôle que celle-ci joue d’ores et déjà dans le développement de l'accès à Internet. Mais il s'agit bien en l'occurrence essentiellement d'une régulation des réseaux de télécommunications qui servent de support aux services Internet. L'établissement d'une régulation adaptée suppose de bien distinguer la régulation des contenants, qui est essentiellement une régulation économique et qui tend à s'unifier en raison de la mise en place d’une nouvelle économie des télécommunications associant télécommunications et audiovisuel, et la régulation des contenus, qui est essentiellement une régulation fondée sur des préoccupations éthiques ou culturelles et qui n'est pas à ce stade assurée sur Internet.

Le Gouvernement envisage la voie de la corégulation pour assurer cette fonction. Cette solution se distingue de l’autorégulation, dans la mesure où elle prévoit une participation des pouvoirs publics. Cette voie pragmatique semble adaptée à la situation d'Internet en France. Cependant, la corégulation ne saurait, par définition, être une régulation indépendante des acteurs. Il conviendra donc de déterminer l’équilibre de la constitution d’un tel organisme, ses objectifs et les moyens, notamment juridiques et humains, dont il devra disposer pour assurer sa mission : définition des compétences propres, articulation avec les procédures existantes notamment juridictionnelles, capacités d’expertise, etc. La corégulation devra être mise en œuvre de manière souple et évolutive tout en permettant que les mêmes règles puissent s'appliquer à l'ensemble des acteurs. Les compétences de cette instance doivent s’articuler de façon claire et harmonieuse avec celles des autres organismes de régulation existants dans les secteurs connexes.

  • Tirer les conséquences de la convergence des supports de communication

L'un des principaux enjeux d'une réglementation d'Internet réside dans son adaptation à l'évolution rapide des technologies. A cette fin, la réglementation doit être neutre par rapport aux technologies utilisées, sous peine de devenir rapidement obsolète. Ainsi, l'émergence de la téléphonie sur IP et la convergence des services de transport de la voix et des services de transmission de données montrent la nécessaire évolution du régime juridique de ces services.

La réglementation et la régulation des réseaux doivent être identiques quels que soient les types d’infrastructures, quelles que soient les technologies utilisées et quels que soient les services qu’ils permettent d’offrir aux utilisateurs. L'harmonisation du régime d'autorisation des réseaux de transport et d’accès, qu'ils utilisent une technologie filaire ou radioélectrique, constituerait un pas important dans le sens d'une simplification. Il en va de même pour les bandes de fréquences utilisées pour les services de télécommunications et les services audiovisuels qui, comme c'est le cas dans de nombreux pays, pourraient faire l’objet d’une gestion unifiée, y compris dans le cas des fréquences spatiales.

Symétriquement, la réglementation et la régulation des services de télécommunications doivent être homogène, quels que soient les réseaux d’infrastructures empruntés et les technologies utilisées.

  • Favoriser l’accès du plus grand nombre aux réseaux de télécommunications

La diffusion de l’accès à Internet passe par le développement concomitant de l'accès à Internet par le réseau commuté et des accès à haut débit, dans le cadre de l’exercice d’une concurrence effective sur la boucle locale. Cependant, le développement de l’utilisation d’Internet par l'ensemble de nos concitoyens passera également par des mesures permettant de faciliter la diffusion des terminaux d’accès (qui sont le plus souvent des micro-ordinateurs), ainsi que par l’acquisition d’un bagage culturel adapté : maîtrise de la lecture et des outils informatiques, capacité à formuler ses recherches et ses choix, maîtrise des langues.

Il est clair que le marché de l'accès à haut débit jouera un rôle moteur dans ce développement. Compte tenu de l'importance des technologie xDSL, le dégroupage de la boucle locale dans ses différentes modalités techniques constitue un moyen efficace de contribuer à l'essor de ce marché, au bénéfice des utilisateurs. Si une évolution du cadre législatif apparaissait souhaitable dans un souci de sécurité juridique, pour la mise en œuvre complète du dégroupage, elle ne devrait pas constituer un préalable à l’engagement des travaux techniques et économiques et à la mise en oeuvre d’autres solutions. Un accès doit dès à présent être offert aux opérateurs, pour leur permettre de fournir les services ADSL dans les mêmes conditions que l'opérateur historique.

Au delà de la question de l'accès, une harmonisation des règles d'interconnexion s’appliquant aux réseaux classiques et aux réseaux de données qui utilisent le protocole IP sera, à moyen terme, nécessaire.

Plus généralement, les règles de la liberté d'accès aux réseaux qui s'appliquent dans le secteur des télécommunications doivent être généralisées, par exemple dans le cas des systèmes d'accès conditionnels, matériels (décodeurs) et immatériels (plates-formes d’accès), appelés à jouer un rôle important dans le cadre de la société de l'information et susceptibles de constituer les goulets d’étranglement du marché global des services de la société de l’information.

Il faut enfin noter l’importance du concept de service universel. En raison de évolutions technologiques et économiques, son contenu et sa fourniture peuvent être appelés à évoluer, même si, pour l'heure, les dispositifs instaurés paraissent satisfaisants.

  • Tenir compte de la dimension internationale d'Internet

L'Autorité tient enfin à souligner le caractère déterminant de la dimension internationale d'Internet. Au-delà des mesures législatives hexagonales, il est essentiel que notre pays soit présent à l'échelon européen et au plan international pour défendre sa conception d'Internet et ses intérêts, face à la domination de fait du continent nord américain.

En conclusion, il apparaît que l’objectif poursuivi est double :

Il s’agit certes de préparer au niveau national les projets de loi relatifs aux questions susceptibles d’être résolues dans un tel cadre. Cependant, il est d’ores et déjà certain que cet objectif ne permettra pas de résoudre l’ensemble des questions soulevées. En raison des délais inhérents au processus législatif, il faut proposer, lorsque c’est possible, les moyens de résoudre à court terme et de façon pragmatique les problèmes posés au plan national.

Cette consultation pourrait contribuer à la mise au point du cadre dans lequel s’inscrira la démarche des autorités françaises appelées à conduire, avec leurs homologues, des discussions au plan international. A cet égard, cette consultation devrait permettre de dégager une " position française " cohérente sur chacun des points.

Cependant, indépendamment de la démarche menée dans le cadre de cette consultation, il s’agit aussi de permettre la conclusion, dans des délais brefs, des processus d’ores et déjà engagés. C’est le cas par exemple de la transposition de certaines directives communautaires, déjà anciennes, sur lesquelles la marge de manœuvre est limitée voire inexistante.


©Autorité de régulation des télécommunications - Octobre 1999
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