Edito

Transition écologique et numérisation de l’économie : à nouveaux défis, nouveaux outils pour la protection du consommateur et la régulation concurrentielle

Par Virginie Beaumeunier, directrice générale de la DGCCRF

Les autorités de contrôle et de régulation doivent faire face à l’accélération du temps économique et aux nouveaux défis de l’économie numérique. La DGCCRF redéfinit ainsi régulièrement les orientations de son programme national d’enquêtes. En 2022, elle privilégie l’accompagnement de la transition écologique (notamment sur les allégations environnementales et l’utilisation du terme « reconditionné ») et la régulation des acteurs de l’économie numérique (opérateurs de communications électroniques, plateformes et places de marchés).

Pour répondre aux besoins d’adaptabilité et de réactivité, la DGCCRF a ainsi mis en œuvre fin 2021, pour la première fois, un nouvel outil du code de la consommation permettant de déréférencer une plateforme des moteurs de recherche et magasins d’application, voire d’en bloquer l’accès. Le code de commerce prévoit également depuis peu que les manquements au règlement « Platform to business » et les pratiques restrictives de concurrence pourront faire l’objet d’une injonction sous astreinte, outil puissant pour obtenir la cessation de pratiques illicites.

À l’échelon européen, la DGCCRF a copiloté, avec la DGE, les négociations sur le Digital Markets Act, qui viennent d’aboutir sous présidence française. Ce texte doit permettre de répondre, en temps réel, aux défis posés par la régulation concurrentielle des plateformes numériques structurantes.

Sur ces sujets transversaux, les autorités de contrôle doivent travailler en étroite collaboration. La DGCCRF sait qu’elle peut compter sur l’expertise de l’Arcep, tant sur des enjeux environnementaux que numériques.

La régulation en action

Bilan de la satisfaction des utilisateurs : la qualité de service toujours en tête des préoccupations

Cette année encore, la principale insatisfaction des utilisateurs des services télécoms est la qualité de service (41%), suivi des problèmes liés à l’évolution des réseaux (23%) et de ceux liés aux contrats, aux pratiques commerciales et aux prix (13%). Les alertes liées au marché postal ont baissé : elles ne représentent plus que 6% du total des alertes en 2021, contre 9% en 2020.

Le 11 mai, l'Arcep a présenté le bilan des 38 000 signalements recueillis en 2021, notamment par le biais de sa plateforme web « J’alerte l’Arcep », et dont l’analyse lui a permis d'instruire plusieurs cas concrets en exploitant différents leviers à sa disposition : dialogue avec les opérateurs, rappel à l'ordre, voire procédure formelle à l’encontre de l’opérateur concerné.

« On ne peut pas dire aujourd'hui qu'il y a une amélioration de la qualité de service, d'exploitation, de raccordement, sur le réseau fibre », a souligné Laure de La Raudière, présidente de l'Arcep, en conférence de presse. Parmi les sujets ayant entrainé des actions de l’Arcep reviennent les problèmes liés aux réseaux fibre : de nombreux débranchements, causant in fine des coupures d’accès pour les utilisateurs ; ou encore les difficultés d’accès au code RIO dans le cadre d’un changement d’opérateur.

Ces enseignements sont complétés et confirmés par la publication, le même jour, de « l'Observatoire de la satisfaction client » qui repose sur un sondage réalisé par l'institut CSA pour le compte de l’Arcep. En 2021, la qualité de service des réseaux reste en tête des principaux problèmes rencontrés par les utilisateurs, même si la satisfaction générale vis-à-vis des opérateurs fixes et mobiles et de leurs services clients est en légère hausse.

Le chiffre

C’est le nombre de mesures effectuées directement par les utilisateurs pour enrichir les données de qualité de service du site Mon Réseau Mobile. C’est 100 fois plus de mesures que dans le cadre de l’enquête classique annuelle de l’Arcep. Particuliers, participez vous-aussi en faisant vos tests via les applications de crowdsourcing 5Gmark (Mozark) et SpeedChecker ! Acteurs du crowdsourcing, contactez-nous pour intégrer le dispositif !

Tout terrain

Le site internet https://maconnexioninternet.arcep.fr/

Un atelier - webinaire sur « Ma connexion internet » avec les maires et les collectivités

« Comment la carte est-elle mise à jour avec les nouvelles habitations sorties de terre ces deux dernières années ? », « Comment faire modifier par les opérateurs les erreurs d'adresses sur la carte ? », « Quelles sont les démarches lorsqu'une habitation est notée "raccordable sur demande" ? », « Faut-il attendre la première assemblée générale pour le choix d'un opérateur fibre dans un immeuble neuf ? », etc…

Ce 11 mai, l'Arcep a répondu à ces questions, et bien d’autres, lors d’un atelier - webinaire de présentation de « Ma connexion internet » destiné aux élus, aux collectivités et à ses contacts habituels : départements, régions, préfectures. Les représentants des Mairies étaient également invités par le biais d’annonces dans Maire Info et La Gazette des communes.

Les quelques 90 participants ont aussi été formés à utiliser les cartes, données et tableaux de bord que l'Autorité partage régulièrement. Ces outils permettent aux collectivités et aux élus d’établir un diagnostic précis sur la connectivité fixe et l'état de déploiement de la fibre sur leurs territoires, et de renseigner leurs administrés.

En savoir plus :

Plaquette de présentation des outils
Inscription à la liste de diffusion "cartes et données de l'internet fixe"

En vue

Dominique Würges

Président de la commission d’études sur l’environnement et le changement climatique de l’UIT-T

Elu président de la commission d’études sur l’environnement et le changement climatique (la « CE 5 ») lors de la dernière Assemblée mondiale de normalisation des télécommunications de l’Union internationale des télécommunications (UIT), Dominique Würges est aussi directeur des relations institutionnelles pour la normalisation d'Orange et, au niveau européen, vice-président de l'Assemblée générale de l'ETSI. La CE 5 est pionnière et emblématique des travaux de standardisation sur les questions d’environnement, d’action pour le climat, le recyclage et l’économie circulaire dans le secteur des TICs. Ses standards servent de référence à l’ensemble du monde industriel (opérateurs et constructeurs), mais aussi aux pouvoirs publics et aux régulateurs.

Bruxelles, l’Arcep et vous

Les opérateurs européens télécoms et postaux s’engagent pour l’Ukraine

Depuis le début du conflit ukrainien, la communauté des télécoms s’est rapidement mobilisée pour apporter son aide aux ressortissants et aux opérateurs touchés par la guerre. Selon les informations recueillies par le groupe des régulateurs européens des télécoms, le BEREC, une grande majorité des opérateurs européens - parmi lesquels les opérateurs français - a mis en place des dispositifs en faveur des citoyens ukrainiens.

Ces actions recouvrent l’offre d’appels internationaux gratuits vers les numéros ukrainiens, la gratuité du roaming intra-européen pour les ressortissants ukrainiens, la mise en place de solutions de connectivité pour les réfugiés (raccordement des camps de transit, offre de cartes SIM, augmentation de la capacité des réseaux mobiles aux frontières), mais aussi des dons de matériels aux opérateurs ukrainiens confrontés à des destructions.

Pour pérenniser cette entraide, en baissant par exemple les tarifs de gros échangés entre opérateurs, les opérateurs télécoms européens, avec l’appui de la Commission, ont signé une déclaration commune avec leurs homologues ukrainiens. Le BEREC et le régulateur ukrainien NCEC ont également entamé un dialogue afin d’associer l’Ukraine aux travaux européens sur les communications électroniques.

Par ailleurs, le groupe des régulateurs postaux européens, le GREP, encourage les initiatives des opérateurs postaux nationaux, comme l’abaissement, voire la suppression, des frais de livraison de colis vers l’Ukraine, en particulier pour les produits médicaux et humanitaires. Des opérateurs comme La Poste prennent par exemple gratuitement en charge l’acheminement vers l’Ukraine des biens de première nécessité, médicaments et autres produits sanitaires collectés par les associations humanitaires, et renoncent à facturer des frais terminaux à la poste ukrainienne.

Pour un numérique soutenable

Enquête annuelle pour un numérique soutenable : premier bilan des données collectées auprès des opérateurs

Le 25 avril, l’Arcep a publié les indicateurs collectés auprès d’Orange, SFR, Bouygues Telecom et Free, pour suivre l’évolution de leur empreinte environnementale.

Les émissions de gaz à effet de serre des quatre principaux opérateurs télécoms ont diminué au cours des dernières années mais leurs émissions liées à la consommation d’électricité (2/3 du total) progressent en raison des déploiements des réseaux et de l’augmentation des usages.

L’enquête a également permis de constater qu’un abonné à la fibre consomme 4 fois moins de KWh qu’un abonné au cuivre. Ou bien encore que la consommation énergétique totale des réseaux mobiles est deux fois plus importante que celle des réseaux fixes. L’utilisation du Wi-Fi sur son mobile constitue donc un geste de sobriété énergétique !

Consciente que l’impact environnemental du numérique repose principalement sur les terminaux, l’Arcep rappelle aussi que les smartphones reconditionnés ne représentent que 13% des 21 millions de téléphones mobiles vendus en France en 2020, et seulement 2% de ceux vendus par les opérateurs. Avec 53% d’appareils inutilisés conservés par leurs propriétaires, le potentiel de collecte reste important et pourrait renforcer le reconditionnement ou le recyclage.

Cette enquête annuelle a vocation à être progressivement enrichie avec de nouveaux indicateurs sur un périmètre plus large d’acteurs, notamment les fabricants de terminaux ou les opérateurs de centres de données.

La pépite à partager

"We are the future in tech"

A résultats et aptitudes équivalentes, les filles sont moins nombreuses, dès le lycée, en spécialité scientifique puis en filières ingénieur et tech (28 % des effectifs). Officiellement lancée le 12 avril à l'Unesco, l’opération “We are the future in tech” se donne pour objectif d'aider les organisations à atteindre l'égalité entre les hommes et les femmes dans le secteur de la tech. L'initiative repose sur la création d'un réseau mondial de 100 femmes, dont 30 françaises, qui acceptent de jouer le rôle de modèles afin de sensibiliser et d'attirer les jeunes femmes vers les métiers du numérique. Parmi elles : Laure de La Raudière, présidente de l’Arcep. Témoignage vidéo (n°59).

Ailleurs dans le monde

L’agence internationale de l’énergie (AIE) étudie la consommation énergétique des centres de données

Le trafic internet mondial a augmenté de plus de 40 % en 2020 en raison de l'augmentation du streaming vidéo, de la visioconférence, des jeux en ligne et des réseaux sociaux. Selon l’AIE, l’utilisation des centres de données a été multipliée par 9 ces dix dernières années, mais leur consommation énergétique n'a augmenté que de 10 % en raison de gains d’efficacité énergétique. La consommation mondiale d'électricité des centres de données en 2020 était de 200-250 TWh, soit environ 1 % des usages mondiaux (hors énergie pour les registres blockchain).

Toujours selon l’AIE, les centres de données font de plus en plus appel à des sources éoliennes et solaires pour améliorer leur bilan environnemental. Cependant, l’intermittence de ces sources d’énergie peut ne pas permettre un usage à 100% d’énergies renouvelables contrairement à ce que certains centres de données peuvent afficher.

L'AIE formule également des recommandations pour renforcer l'efficacité énergétique des centres de données, définir des objectifs environnementaux clairs, viser la réduction des impacts sur tout leur cycle de vie (extraction des matières premières, fabrication, transport et élimination/recyclage en fin de vie), mais aussi améliorer la collecte et la transparence des données sur les usages énergétiques dans le secteur. En effet, selon l’AIE, l’amélioration rapide de l’efficacité énergétique observée ces dernières années doit se poursuivre dans la décennie à venir pour maîtriser la demande énergétique associée à nos usages numériques fortement croissants.

L'Arcep raconte

A gauche : Imke Strampe (BNetzA); à droite : Léa Ployaert (Arcep)

Regards croisés sur la régulation : Imke Strampe (BNetzA) et Léa Ployaert (Arcep)

Elle s’appelle Imke Strampe, travaille chez BNetzA, le régulateur allemand, et a passé 3 mois à l’Arcep, à Paris. Elle est cheffe d’unité à la direction des Affaires Juridiques de l’Arcep, se nomme Léa Ployaert, et a séjourné 3 semaines au BNetzA, à Bonn. Au cours de cet échange, le premier du genre à l’Arcep avec un régulateur européen, toutes deux ont travaillé sur l’impact environnemental du numérique. Objectif : favoriser des partages d’expérience bénéfiques à la mise en œuvre d’une régulation plus efficace pour les deux autorités. Elles reviennent sur quelques-uns de leurs étonnements.

Imke : « Comparé au BNetzA, presque tout est différent à l’Arcep : beaucoup plus petite - BNetzA compte environ 3000 employés -, l’Arcep ne s’occupe pas de la régulation des marchés d’énergie et de transport. Les collaborateurs sont plus jeunes et la proportion d’économistes et de juristes est très différente, la part des juristes étant plus faible à l’Arcep. Le Collège auquel les équipes présentent leurs travaux n’existe pas au BNetzA. L’approche de la régulation par la donnée et les cartes de l’Arcep m’ont beaucoup intéressée car elles augmentent la transparence et la concurrence sur la qualité entre opérateurs. Enfin, le traitement des sujets environnementaux est très avancé à l’Arcep, comparé au BNetzA ».

Léa : « Je me représentais une structure articulée autour d’un Collège et de services, comme à l’Arcep. Or, BNetzA est composé d’unités fonctionnelles et de chambres chargées de l’adoption des décisions (« BeschlussKammer »). Les marchés respectifs se distinguent fortement, impliquant des régulations spécifiques. Là où la fibre a vocation à devenir l’infrastructure de référence en France, celle-ci occupe une place marginale en Allemagne où elle est déployée par des acteurs locaux. Le marché allemand reste dominé par le cuivre et le câble, si bien que les réflexions autour d’une fermeture de l’infrastructure historique, déjà bien engagées en France, demeurent à ce stade très prospectives outre-Rhin. »

De leurs expériences croisées, Imke et Léa ont identifié des sujets de convergence forts entre leurs institutions. A titre d’exemple, BNetzA et l’Arcep ont toutes deux mis le numérique – en particulier les travaux sur la régulation des grandes plateformes dans le cadre du DMA - à leur agenda.

On vous donne rendez-vous

24 mai 2022, Paris

Conférence Telconomics

L’Arcep présentera à 9h30 aux journalistes et aux analystes financiers les données structurantes du marché des télécoms pour l’année 2021. Investissements dans les réseaux fixes et mobiles, revenus des opérateurs, abonnements au très haut débit, fixe et mobile, etc … La conférence sera également l’occasion de faire le point sur les actions menées par l’Autorité en faveur de l’investissement. Ouvert à la presse et aux analystes financiers / Sur invitation.

30 juin 2022, Paris

Conférence sur l’état d’internet en France

L’Arcep présentera le 30 juin à 15 h aux acteurs de l’écosystème d’internet l’édition 2022 de son rapport annuel sur l’état d’internet en France. L’Arcep exposera les évolutions marquantes des différentes composantes des réseaux internet fixes et mobiles pour 2021 : la qualité de service, l’interconnexion de données, la transition vers IPv6, la neutralité du net, le rôle des plateformes et l’impact environnemental du numérique. L’enjeu ? Veiller à ce qu’internet continue à se développer comme un « bien commun ».

 

On y participe

18 mai 2022, Paris

Assises de la Souveraineté Numérique

« Vers des plateformes numériques européennes de taille internationale ? » : Laure de La Raudière, présidente de l'Arcep, interviendra le 18 mai sur ce thème dans le cadre d’un petit déjeuner des Assises de la Souveraineté Numérique organisé l’agence Aromates. Elle rappellera l’engagement de l’Arcep et ses travaux sur le Digital Markets Act, visant à garantir une concurrence loyale et efficace et une plus grande la liberté de choix du consommateur.

23 et 24 mai 2022, Brazzaville

19ème Séminaire FRATEL

L’Agence de Régulation des Postes et des Communications électroniques (ARPCE) de la République du Congo et l’Institut Luxembourgeois de Régulation (ILR), président de Fratel en 2022, organisent les 23 et 24 mai, en présentiel et en ligne, le 19ème séminaire du réseau francophone à Brazzaville (République du Congo) sur la sécurité des réseaux de nouvelle génération. Serge Abiteboul, membre du collège de l’Arcep, présidera la table ronde du 24 mai : « L’évolution des technologies et des architectures réseaux implique-t-elle des nouvelles problématiques de sécurité ? »

1er et 2 juin 2020, Paris

TRIP de printemps 2022

Le colloque de printemps 2022 de l’Avicca se déroulera début juin à Paris. Laure de La Raudière participera, le 1er juin à 14h, aux côtés de Patrick Chaize, président de l’Avicca, et de Philippe Le Grand, président d’InfraNum, à un débat sur les avancées et les évolutions des principaux sujets d’aménagement numérique des territoires.

8, 9 et 10 juin, Chypre

Réunion plénière du BEREC

La 2ème réunion plénière 2022 du groupe des régulateurs européens des télécoms se déroulera les 8, 9 et 10 juin à Chypre en présence de Laure de La Raudière et d’Emmanuel Gabla, membre du collège et vice-président du BEREC. Au programme : l’adoption du premier rapport du BEREC sur l’impact environnemental du numérique et le lancement d’une consultation publique sur l’écosystème internet, afin d’évaluer la situation concurrentielle et l’ouverture de l’essentiel des maillons qui constituent internet.