Appel à commentaires sur une proposition d’évolution du plan de numérotation pour les numéros non géographiques de la forme 08ABPQMCDU

Réponse de l'Adéic-fen

Il apparaît à la lecture de l'appel à commentaires de l'ART que :

1°) L'ART va trop vite. Les questions méritent une attention plus approfondie d'autant qu'elles ne relèvent pas toutes de son domaine de compétences.

2°) l'ART appuie son raisonnement sur la notion de "numéros non géographiques". Elle distingue services de libre appel, services à coûts partagés, services à revenus partagés. Elle propose donc de numéroter les différents paliers tarifaires.

Cette classification selon les paliers tarifaires nous semble insuffisante. Elle continue de mélanger dans une même catégorie de numéros, les services d'informations pouvant être considérés comme "utiles" et ceux de caractère nettement plus douteux.

Nous souhaitons qu'une classification s'opère également selon la nature des services et distingue les serveurs pour adultes et ceux destinés exclusivement aux enfants mineurs. D'autres pays opèrent de telles classifications nous pouvons le faire en France, aussi.

3°) La préoccupation principale de l'ART est de clarifier la mise à disposition des opérateurs des ressources en numéros. La question de la portabilité de ces numéros est notamment posée c'est à dire la possibilité pour l'utilisateur de "conserver son numéro lorsqu'il change de fournisseur de services de télécommunications".

"L'utilisateur" est ici ce que nous appelons un éditeur de services. Cela signifie qu'un ripoux - et il y en a - qui se voit privé de son service par un opérateur, aujourd'hui France Télécom, parce qu'il ne respecte pas un minimum de règles de loyauté à l'égard des consommateurs, pourra passer chez un autre opérateur tout en conservant son numéro de téléphone. Cela est inadmissible.

Dans le cas où le consommateur choisit volontairement le service restreint, ce choix doit evidemment s'appliquer à tous les opérateurs.

Les modalités communes à tous les opérateurs doivent être définies

La proposition de l'ART n'utilise que les ressources en numéros de la série 0800. La distinction entre les différents paliers tarifaires ne portera que sur un seul chiffre. La distinction ne nous paraît pas suffisamment nette. Les consommateurs ont peu ou prou et souvent à leur dépend appris à mémoriser les numéros 3668 et un prix de 2,23 francs la minute. Il y a risque de remplacer une confusion par une autre.

Pourquoi ne s'en tenir qu'à ce seul préfixe 08 ?

4°) L'Audiotel est actuellement, pour ainsi dire, une marque déposée et codifiée par France Télécom. Les codes de déontologie que s'engagent à respecter les fournisseurs de services font l'objet d'un contrat. Des manquements graves peuvent conduire à la résiliation du contrat et au décâblage du fournisseur. Ce système malgré ses imperfections et ses insuffisances - le consommateur n'est pas partie contractante et ne bénéficie d'aucune réparation pour préjudice - a permis de contenir certains débordements. Le contrôle de ces débordements reste cependant tributaire de la volonté de l'ancien opérateur public.

Qu'en sera-t-il demain ?

Les questions posées à ce sujet par les organisations de consommateurs sont à ce jour restées sans réponse.

Elles ont été formulées, au nom des autres associations, par Mme Ghislaine Angles d'Auriac de l'UNAF au Colloque de l'ART, le 15 décembre 1997.

Elles sont les suivantes :

- Qui sera chargé de l'élaboration de règles déontologiques contractuelles engageant les prestataires de services auprès des nouveaux opérateurs ? Si le Conseil supérieur de la Télématique est chargé de cette mission, quand le sera-t-il, quelles seront sa composition et ses missions ?

- Qui contrôlera les services ? Le système actuel n'est pas satisfaisant. Ce contrôle doit être indépendant. Qui le financera ?

Pour garantir une bonne concurrence, tous les fournisseurs et opérateurs doivent être soumis aux mêmes règles et les structures de contrôle doivent être mises en place.

L'intérêt des consommateurs est dans l'état actuel du texte de l'ART minoré par rapport à celui des opérateurs. Ces derniers se rendent-ils compte qu'ils auront à gérer des services dont ils ne maîtriseront pas les contenus et qu'il serait dans leur intérêt bien compris d'opérer dans la transparence et d'élaborer des règles communes ?

Les attentes des consommateurs

Quelle que soit la nature du produit ou du service, les consommateurs demandent de la loyauté dans les relations commerciales. La communication est devenue un service commercial.

Quels que soient le produit ou le service, le consommateur a besoin d'avoir confiance dans le sérieux des offres qui lui sont faites.

A ce besoin doit correspondre une information loyale.

Les consommateurs attendent que les "arnaqueurs" soient sanctionnés, que l'on fasse respecter la loi. La loyauté se mesure donc, entre autre, à la qualité de l'information. L'information doit être lisible, vérifiable et les mensonges sanctionnés.

Une clarification s'impose ainsi qu'un affichage systématique des tarifs spéciaux.

Il faut pour cela, à notre avis, des dispositions d'ordre public. Une saine concurrence suppose des règles générales applicables à tous.

Elles concernent en particulier l'information préalable du consommateur

La directive vente à distance.

Le considérant (12) de la Directive européenne sur la vente à distance précise que dans le cas d'une communication par téléphone, il convient que le consommateur reçoive suffisamment d'informations au début de la conversation afin de décider s'il continue ou non celle-ci.

Les informations préalables fournies en temps utile, c’est à dire avant la conclusion de tout contrat à distance, portent sur :

a) identité du fournisseur

b) caractéristiques essentielles du bien et du service

c) prix du bien et du service, toutes taxes comprises

L'indication d'un prix à la minute est-il suffisant ou faut-il donner une évaluation du temps nécessaire ?

g) coût de l'utilisation de la technique de communication à distance, lorsqu'il est calculé sur une base autre que le tarif de base.

L'information participe de l'organisation des relations marchandes. La tendance, aujourd'hui, est de les faire payer par le biais, notamment, de numéros de téléphone surfacturés, tels les numéros Audiotel ou les numéros indigos.

Toute connexion à un numéro surfacturé doit être précédée gratuitement de l’annonce des tarifs.

Ces tarifs ne s'appliquent que pour les communications "normales" et à partir d'un téléphone fixe vers un téléphone fixe.

Les exemples étrangers

Dans le cadre d'une étude qu'elle rendra public prochainement, l'Adéic-fen s'est intéressée à la manière dont d'autres pays européens abordent la question.

a) en Belgique

Belgacom propose deux types de service dont le but est de mettre des informations à la disposition du public par l'intermédiaire du réseau téléphonique public.

Le service Infokiosque caractérisé par l'indicatif 077, le service Consultel caractérisé par les indicatifs 0900, 0901, 0902 ou 0903.

D'une durée maximale limitée à 30 minutes, les "077" sont réservés aux messageries roses tandis que les "0900" concernent les autres services (concours, réservations, renseignements).

b) Au Portugal

Les services à valeur ajoutée ont deux classifications possibles au Portugal, avec des préfixes d'accès différenciés.

Les services dits "récréatifs et commerciaux" caractérisés par le préfixe d'accès 0641. Les services dits "informatifs et utilitaires" caractérisés par le préfixe d'accès 0601.

Une distinction est faite entre les serveurs qui adoptent le code qui opèrent sur un préfixe différent de ceux qui ne le respectent pas.

Au Portugal, les opérateurs téléphoniques ont le droit de refuser l'accès à leur réseau aux serveurs qui n'adoptent pas le Code.

c) Au Royaume Uni

Les indicatifs se regroupent en 4 catégories les 03 et 06 et les 08 et 09.

A l'exception d'un préfixe forfaitaire, ils sont tous facturés à la minute.

Au Royaume-Uni, les sociétés qui souhaitent opérer sur les tarifs les plus élevés à £1,50 par minute ont besoin d'une autorisation préalable de l'ICSTIS pour le faire.

Une telle autorisation est également requise pour certains services opérant à £1,00 par minute et depuis 1996 pour tous les services d'échanges simultanés quelle que soit leur tarification.

Comme les consommateurs ne s'y retrouvaient plus dans le système de numérotation, il a été, décidé que tous les services relevant d'une surtarification commenceraient par le préfixe 09. Cette harmonisation est en cours. Progressivement tous les serveurs changent d'indicatif.

Au Royaume-Uni, les serveurs enfants sont limités à 4,50 $ (ce qui correspond à une durée de 6 à 7 mn et demi selon les préfixes). Il n'y a pas de limitation particulière pour les autres services.

d) En Allemagne

En octobre 1997, s'est créée en Allemagne une instance d'autocontrôle des services téléphoniques à valeur ajoutée.

Les entreprises qui adhèrent volontairement à cette instance s'engagent sur un code de déontologie portant sur les contenus, les tarifs, la publicité. En contrepartie de ce respect un "label" leur est attribué.

Elles s'engagent en outre à respecter une classification des préfixes en fonction de leurs contenus. C'est ainsi par exemple que les préfixes 0900 doivent être réservés à des services d'information et les 0903 pour les purs divertissements.

Les numéros spéciaux (0900, 0901, 0905)

L'offre de services est précédée d'une information sur les coûts de l'appel en DM par minute et par service et les changements éventuels de services. "Cette information est gratuite"

Pour les services à valeur ajoutée, il existeplusieurs possibilités tarifaires : tarifs fixes, flexibles, changeants au forfait.

Les éditeurs sont tenus de se faire confirmer expressément l'acceptation du service dès lors que son coût dépasse 5 DM la minute ou l'appel. La confirmation de l'acceptation se fera toujours par le chiffre '19'. Le temps d'attente maximal est de 3 secondes. L'absence de réponse ou la réponse erronée conduit automatiquement à l'interruption de la communication.

Les contenus des offres doivent correspondre à des préfixes déterminés.

0900 : information. Ce préfixe n'autorise aucun contenu ou allusion sexuelle ou érotique.

0901 : divertissement. Ce préfixe n'autorise aucun contenu ou allusion sexuelle ou érotique.

0905 : érotisme et sexe

Les mêmes principes de base s'appliquent à tous les supports publicitaires ne doivent pas induire en erreur sur les coûts et les contenus.

Les offres qui ciblent les mineurs doivent l'être à un tarif ne dépassant pas 3,00 DM par appel. Les incitations à rappeler ne sont pas admises. A cela s'ajoute l'obligation de faire précéder la communication d'une référence à l'autorisation du (des) parents(s) ou responsable légal.

Quelles que soient les limites des codes de déontologie négociés exclusivement entre professionnels volontaires, surtout quand ils ne sont pas contractuels - parce qu'ils laissent le champ libre à tous ceux qui n'y adhèrent pas - il est intéressant de relever certaines mesures, notamment celles concernant les services à destination des mineurs. Elles rejoignent les demandes faites par l'Adéic-fen depuis plusieurs années.

Pourquoi ce qui est possible dans d'autres pays ne le serait-il pas en France ?

L'Audiotel ne résume en effet qu'une partie du problème. Les numéros étrangers ne sont pas identifiables comme des services à valeur ajoutée.

La première information pour le consommateur est la structure du numéro qu'il est invité à appeler. Nous avions regretté en son temps que le passage à la numérotation à dix chiffres qui prévoyait l'ouverture à la concurrence n'ait pas été utilisée pour organiser une classification des numéros de téléphone.

Une telle classification s'impose. Tout comme parait se profiler la nécessité de classifier les annonces publicitaires pour l'Audiotel. Cela existe dans d'autres pays.

A cette notion trop exclusivement liée à France Télécom, d'Audiotel, peut-être faut-il préférer celle d'Audiotexte ou plus généralement encore de "services téléphoniques à valeur ajoutée".

Une nouvelle question est posée par les consommateurs devant la généralisation des numéros surfacturés (Indigo, Audiotel), outre leur identification claire, celle de la justification de la qualité de l'information pour laquelle un surcoût est demandé.

L'Adéic-fen souhaite que les numéros ne soient pas seulement structurés en fonctions de leur paliers tarifaires mais en fonction de leurs contenus et qu'une discussion s'engage pour fixer des règles communes à tous les opérateurs.


©Autorité de régulation des télécommunications - janvier 1999
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